Faciliter l'accès des patients aux traitements innovants
Afin d’offrir aux patients un accès le plus rapide possible aux innovations représentant une avancée thérapeutique majeure ou répondant à un besoin médical non couvert, différentes procédures nous permettent d’encadrer et d’accompagner la mise à disposition de produits innovants de façon précoce, sûre et équitable.
Premiers enseignements et illustration de l’impact de cette réforme à travers l’exemple du Trodelvy.
Regards sur… Faciliter l'accès des patients aux traitements innovants
Parmi les temps forts de l’année 2021 figure la réforme de l’accès dérogatoire aux médicaments. Cette réforme vise à permettre à des patients en impasse thérapeutique de bénéficier rapidement de traitements innovants avant leur mise sur le marché. (lien)Premiers enseignements et illustration de l’impact de cette réforme à travers l’exemple du Trodelvy.
![]() Isabelle Yoldjian |
![]() Kevin Fournier |
Quels premiers enseignements pouvez-vous tirer de la réforme de l’accès dérogatoire aux médicaments ?
Isabelle Yoldjian : “La réforme a été mise en place le 1er juillet 2021. Il est encore trop tôt, moins d’un an
après, pour en dresser un bilan global mais, d’ores et déjà, nous constatons que l’accès précoce à des traitements innovants est toujours aussi performant. Des patients atteints de maladies graves ou rares, en impasse thérapeutique, ont ainsi pu être soignés.”
Kevin Fournier : “Nous avons relevé le challenge d’associer nos compétences à celles de la Haute Autorité de santé (HAS) pour l’évaluation, en amont de l’AMM, des autorisations d’accès précoces (AAP) ex-ATU de cohorte, les autorisations d’accès compassionnels (AAC), ex-ATU nominatives, restant uniquement gérées par l’ANSM. La réforme fixe un certain nombre de règles et de délais à respecter. Elle impose notamment une décision d’AAP en 90 jours maximum. Aujourd’hui, en 2021-2022, l’ANSM, qui s’engage dans sa convention sur l’évaluation des AAP avec la HAS à rendre son avis sur le rapport bénéfices/risques en maximum 60 jours, a largement tenu ses engagements puisque l’avis est parvenu en 40 jours en moyenne, voire pour certains produits en quelques jours.”
après, pour en dresser un bilan global mais, d’ores et déjà, nous constatons que l’accès précoce à des traitements innovants est toujours aussi performant. Des patients atteints de maladies graves ou rares, en impasse thérapeutique, ont ainsi pu être soignés.”
Kevin Fournier : “Nous avons relevé le challenge d’associer nos compétences à celles de la Haute Autorité de santé (HAS) pour l’évaluation, en amont de l’AMM, des autorisations d’accès précoces (AAP) ex-ATU de cohorte, les autorisations d’accès compassionnels (AAC), ex-ATU nominatives, restant uniquement gérées par l’ANSM. La réforme fixe un certain nombre de règles et de délais à respecter. Elle impose notamment une décision d’AAP en 90 jours maximum. Aujourd’hui, en 2021-2022, l’ANSM, qui s’engage dans sa convention sur l’évaluation des AAP avec la HAS à rendre son avis sur le rapport bénéfices/risques en maximum 60 jours, a largement tenu ses engagements puisque l’avis est parvenu en 40 jours en moyenne, voire pour certains produits en quelques jours.”
Pourquoi le Trodelvy représente-t-il une bonne illustration de cette réforme ?
IY : “Traitement contre le cancer, le Trodelvy est emblématique des dossiers de demande d’accès dérogatoire, qui concernent à plus de 50 % la cancérologie. Il est l’exemple des raisons pour lesquelles l’accès précoce à un médicament peut être essentiel : autorisé sur le marché aux États‑Unis depuis avril 2020, le Trodelvy est prescrit à des femmes jeunes atteintes d’un cancer du sein dit “triple négatif”, une maladie rare et extrêmement grave, et il a permis une amélioration majeure.
En multipliant par deux la survie globale des patientes, c’est une révolution pour elles.
Mais ni en France, ni en Europe, les femmes éligibles ne devaient pouvoir en bénéficier avant la fin de l’année 2021, le laboratoire ne pouvant le mettre à leur disposition avant, compte tenu de la complexité de sa fabrication.
S’il restera pour nous un marqueur de cette réforme, c’est qu’il a été l’un des tout premiers à obtenir une autorisation d’accès précoce dans des temps réduits, avec une demande déposée le 28 juillet et une autorisation accordée le 2 septembre 2021. Cette rapidité est le résultat de mois de mobilisation en amont de la part de nos équipes. En fin d’année 2020, dans le cadre de l’ancien système d’accès dérogatoire, nous avions accordé 64 ATU nominatives. En février 2021, en lien avec les associations de patients et les professionnels de santé, nous avons œuvré auprès du laboratoire et réussi à obtenir quelques lots complémentaires. Début juin, nous avons alors mis en place un dispositif totalement inédit, dit “roulant”, permettant le transfert du traitement des femmes, devenues inéligibles en raison de la progression de leur maladie, à de nouvelles patientes. Près de 150 patientes ont pu y accéder, un réel espoir pour elles. À partir de juillet 2021 et pendant des mois, la France a été le seul pays européen à disposer de ce traitement.
Afin d’élargir l’accès au Trodelvy à l’ensemble de la population cible, estimée à environ 1 500 françaises, nous avons convaincu le laboratoire de déposer fin juillet une demande d’accès précoce, en parallèle de sa demande d’autorisation de mise sur le marché (AMM) en Europe. Notre évaluation du bénéfice/ risque était déjà faite, nous avons pu transmettre notre avis favorable à la HAS en 8 jours. Résultat : le 2 septembre 2021, le Collège de la HAS a autorisé l’accès précoce au Trodelvy. Ce dernier a pu démarrer le 2 novembre, presque un mois avant la délivrance de l’AMM par la Commission européenne le 22 novembre 2021.
Ainsi, la mobilisation collective de l’Agence, de la HAS, des associations de patients et des professionnels de santé a permis la mise à disposition anticipée d’un médicament très attendu.”
KF : “Pour le Trodelvy, la HAS a suivi très rapidement notre avis. Ce traitement est donc passé de l’accès compassionnel à l’accès précoce et enfin à l’AMM. Sans rupture dans l’accès, il est passé par toutes les étapes du processus, les unes initiées avant la réforme, les autres après, avec une mise à disposition optimisée de A à Z. Aujourd’hui, la réforme permet d’accélérer les évaluations et les procédures administratives tout en assurant la continuité de l’accès aux traitements.”
En multipliant par deux la survie globale des patientes, c’est une révolution pour elles.
Mais ni en France, ni en Europe, les femmes éligibles ne devaient pouvoir en bénéficier avant la fin de l’année 2021, le laboratoire ne pouvant le mettre à leur disposition avant, compte tenu de la complexité de sa fabrication.
S’il restera pour nous un marqueur de cette réforme, c’est qu’il a été l’un des tout premiers à obtenir une autorisation d’accès précoce dans des temps réduits, avec une demande déposée le 28 juillet et une autorisation accordée le 2 septembre 2021. Cette rapidité est le résultat de mois de mobilisation en amont de la part de nos équipes. En fin d’année 2020, dans le cadre de l’ancien système d’accès dérogatoire, nous avions accordé 64 ATU nominatives. En février 2021, en lien avec les associations de patients et les professionnels de santé, nous avons œuvré auprès du laboratoire et réussi à obtenir quelques lots complémentaires. Début juin, nous avons alors mis en place un dispositif totalement inédit, dit “roulant”, permettant le transfert du traitement des femmes, devenues inéligibles en raison de la progression de leur maladie, à de nouvelles patientes. Près de 150 patientes ont pu y accéder, un réel espoir pour elles. À partir de juillet 2021 et pendant des mois, la France a été le seul pays européen à disposer de ce traitement.
Afin d’élargir l’accès au Trodelvy à l’ensemble de la population cible, estimée à environ 1 500 françaises, nous avons convaincu le laboratoire de déposer fin juillet une demande d’accès précoce, en parallèle de sa demande d’autorisation de mise sur le marché (AMM) en Europe. Notre évaluation du bénéfice/ risque était déjà faite, nous avons pu transmettre notre avis favorable à la HAS en 8 jours. Résultat : le 2 septembre 2021, le Collège de la HAS a autorisé l’accès précoce au Trodelvy. Ce dernier a pu démarrer le 2 novembre, presque un mois avant la délivrance de l’AMM par la Commission européenne le 22 novembre 2021.
Ainsi, la mobilisation collective de l’Agence, de la HAS, des associations de patients et des professionnels de santé a permis la mise à disposition anticipée d’un médicament très attendu.”
KF : “Pour le Trodelvy, la HAS a suivi très rapidement notre avis. Ce traitement est donc passé de l’accès compassionnel à l’accès précoce et enfin à l’AMM. Sans rupture dans l’accès, il est passé par toutes les étapes du processus, les unes initiées avant la réforme, les autres après, avec une mise à disposition optimisée de A à Z. Aujourd’hui, la réforme permet d’accélérer les évaluations et les procédures administratives tout en assurant la continuité de l’accès aux traitements.”
Plus largement, combien d’avis sur l’accès précoce avez-vous transmis à la HAS depuis la mise en œuvre de la réforme et comment travaillez-vous avec cette autre institution de santé ?
KF : “Depuis la mise en œuvre de la réforme et jusqu’à la fin de l’année 2021, 7 avis ont été donnés par l’ANSM. C’est un nombre important car ces dossiers complexes sont à évaluer dans des délais contraints. Le nombre d’avis est pour le moment identique à celui qui existait avant la réforme. Ces avis sont le point d’orgue de tout un travail que nous faisons en amont, avant le dépôt des dossiers de demande d’AAP, par les rendez‑vous pré-dépôt notamment. Près d’une quarantaine de rendez-vous de pré-dépôt ont ainsi été organisés avec les laboratoires et la HAS pour apporter aux demandeurs nos conseils, vérifier la pertinence, la qualité et l’exhaustivité de leur projet de demande d’autorisation d’accès précoce.
A l’image de la plateforme unique, e-saturne, déjà existante pour les AAC, nous avons mis en place une plateforme unique de dépôt dédiée à l’accès précoce, afin de centraliser les demandes d’AAP. Parallèlement, il a fallu construire une organisation qui permette de respecter les délais imposés et intégrer au dispositif d’accès précoce le nouvel acteur qu’est la HAS.
Globalement, nous constatons une accélération de la mise à disposition de produits innovants via l’accès dérogatoire.
Sur l’accès compassionnel, uniquement géré par l’ANSM, le nombre d’autorisations a été multiplié par deux en deux ans, pour atteindre plus de 51 000 autorisations octroyées en 2021. Cette augmentation du nombre de demandes d’accès compassionnel est le témoin des attentes des professionnels de santé et des patients sur les produits innovants. Le besoin est tout particulièrement fort pour 5 produits qui représentent 50 % de ces autorisations, mais 280 autres médicaments ont pu répondre aux besoins spécifiques d’un ou de quelques patients. En effet, il est à noter que les 140 demandes d’AAC en moyenne reçues quotidiennement répondent à des besoins souvent vitaux pour des patients en impasse thérapeutique.
Pour l’accès précoce, les délais contraints, à la fois pour l’ANSM et la HAS, permettent également aux patients d’accéder plus rapidement à l’innovation. Entre les dispositifs, il y a souvent une continuité d’accompagnement : nous détectons d’abord une innovation, que nous pouvons mettre à disposition dans le cadre des AAC, première porte d’entrée de l’innovation, puis nous accompagnons le laboratoire vers une demande d’accès précoce, puis vers l’AMM.”
A l’image de la plateforme unique, e-saturne, déjà existante pour les AAC, nous avons mis en place une plateforme unique de dépôt dédiée à l’accès précoce, afin de centraliser les demandes d’AAP. Parallèlement, il a fallu construire une organisation qui permette de respecter les délais imposés et intégrer au dispositif d’accès précoce le nouvel acteur qu’est la HAS.
Globalement, nous constatons une accélération de la mise à disposition de produits innovants via l’accès dérogatoire.
Sur l’accès compassionnel, uniquement géré par l’ANSM, le nombre d’autorisations a été multiplié par deux en deux ans, pour atteindre plus de 51 000 autorisations octroyées en 2021. Cette augmentation du nombre de demandes d’accès compassionnel est le témoin des attentes des professionnels de santé et des patients sur les produits innovants. Le besoin est tout particulièrement fort pour 5 produits qui représentent 50 % de ces autorisations, mais 280 autres médicaments ont pu répondre aux besoins spécifiques d’un ou de quelques patients. En effet, il est à noter que les 140 demandes d’AAC en moyenne reçues quotidiennement répondent à des besoins souvent vitaux pour des patients en impasse thérapeutique.
Pour l’accès précoce, les délais contraints, à la fois pour l’ANSM et la HAS, permettent également aux patients d’accéder plus rapidement à l’innovation. Entre les dispositifs, il y a souvent une continuité d’accompagnement : nous détectons d’abord une innovation, que nous pouvons mettre à disposition dans le cadre des AAC, première porte d’entrée de l’innovation, puis nous accompagnons le laboratoire vers une demande d’accès précoce, puis vers l’AMM.”
De nouvelles évolutions sont-elles encore à prévoir ?
IY : “L’exemple du Trodelvy et celui des autorisations qui ont suivi ont démontré que le travail en commun et la mobilisation de chacun sont les ingrédients du succès.”
KF : “Avec un retour d’expérience global prévu un an après la mise en œuvre de la réforme, nous allons challenger nos modalités de fonctionnement et étudier des pistes d’optimisation afin d’assurer toute la fluidité nécessaire au bénéfice des patients.”
KF : “Avec un retour d’expérience global prévu un an après la mise en œuvre de la réforme, nous allons challenger nos modalités de fonctionnement et étudier des pistes d’optimisation afin d’assurer toute la fluidité nécessaire au bénéfice des patients.”
Temps fort
Lancement de l’expérimentation du cannabis médical
L’expérimentation a débuté le 26 mars 2021 par la prescription de cannabis médical au premier patient au CHU de Clermont-Ferrand, en présence d’Olivier Véran, ministre des Solidarités et de la Santé. Prévue sur 24 mois, elle pourra inclure 3 000 patients en file active au maximum, dans le cadre sécurisé mis en place par l’ANSM :
Cette expérimentation prolonge les travaux initiés dès 2018, avec la création d’un comité sur l’évaluation de la pertinence et de la faisabilité de la mise à disposition du cannabis à usage thérapeutique en France. Cette réflexion s’est fondée sur des données scientifiques convergentes montrant un intérêt du cannabis dans le traitement de certains symptômes de différentes pathologies, une demande de plus en plus forte des patients et des professionnels de santé et la mise à disposition du cannabis à usage médical dans de nombreux pays.
Les travaux que nous avons menés en concertation avec les professionnels de santé et les patients, ont conclu qu’il était pertinent d’autoriser l’usage du cannabis médical dans certaines situations cliniques.
Nous avons donc souhaité la mise en place d’une expérimentation pour évaluer le cadre en situation réelle et recueillir ainsi les premières données françaises d’efficacité et de sécurité du cannabis médical. L’utilisation du cannabis en France pour cette expérimentation a été autorisée par la loi n°2019-1446 de financement de la sécurité sociale pour 2020 et le décret en Conseil d’État n°2020-1230 du 7 octobre 2020.
- l’initiation du traitement est strictement réservée aux médecins volontaires exerçant dans des structures de référence, essentiellement hospitalières,
- le suivi de tous les patients est sécurisé par la mise en place d’un registre national électronique,
- la délivrance est sécurisée par l’application de la réglementation des stupéfiants pour les médicaments, tous importés de fabricants étrangers et contrôlés par les laboratoires de l’Agence,
- tous les professionnels de santé inclus dans l’expérimentation doivent avoir reçu et validé une formation obligatoire.
Cette expérimentation prolonge les travaux initiés dès 2018, avec la création d’un comité sur l’évaluation de la pertinence et de la faisabilité de la mise à disposition du cannabis à usage thérapeutique en France. Cette réflexion s’est fondée sur des données scientifiques convergentes montrant un intérêt du cannabis dans le traitement de certains symptômes de différentes pathologies, une demande de plus en plus forte des patients et des professionnels de santé et la mise à disposition du cannabis à usage médical dans de nombreux pays.
Les travaux que nous avons menés en concertation avec les professionnels de santé et les patients, ont conclu qu’il était pertinent d’autoriser l’usage du cannabis médical dans certaines situations cliniques.
Nous avons donc souhaité la mise en place d’une expérimentation pour évaluer le cadre en situation réelle et recueillir ainsi les premières données françaises d’efficacité et de sécurité du cannabis médical. L’utilisation du cannabis en France pour cette expérimentation a été autorisée par la loi n°2019-1446 de financement de la sécurité sociale pour 2020 et le décret en Conseil d’État n°2020-1230 du 7 octobre 2020.
Chiffres clés
- 277 accompagnements scientifiques ou réglementaires pris en charge via le Guichet innovation et orientation
- 73 avis scientifiques européens attribués à la France
- 51 096 ATU nominatives ou AAC octroyées et 28 876 patients inclus
- 27 nouvelles ATU de cohorte octroyées et 7 avis favorable d'AAP rendus
- 1 098 patients inclus dans l’expérimentation du cannabis médical
- 855 essais cliniques autorisés pour les médicaments et 80 pour les DM et DMDIV
- 636 AMM et enregistrements délivrés par l’ANSM (procédure nationale et procédures européennes décentralisées et de reconnaissance mutuelle)
- 18 dossiers d’AMM en procédure centralisée attribués à la France
- France rapporteur ou co-rapporteur pour 100 PIP (3ème position)
- La France est le 1er État membre libérateur de lots de vaccins sur les marchés français et européen.