Lemtrada (alemtuzumab), crèmes à base d’oestradiol à dosage élevé, modafinil et grossesse : retour d’information sur le PRAC d’avril 2019
Lors de la réunion mensuelle du Comité pour l’Evaluation des Risques en matière de Pharmacovigilance (PRAC) de l’Agence européenne des médicaments (EMA), qui s’est tenue du 8 au 11 avril 2019 à Londres, le PRAC a démarré une procédure de réévaluation européenne concernant Lemtrada® (alemtuzumab) et les crèmes contenant de l'estradiol à dosage élevé. Ont également été présentés les résultats d’évaluation des données de sécurité liées à l’utilisation du modafinil en cas de grossesse.
Démarrage d’une procédure réévaluation européenne (arbitrage de sécurité - article 20) concernant Lemtrada® (alemtuzumab)
Lemtrada® (alemtuzumab) est indiqué chez les patients adultes atteints d’une forme active de sclérose en plaques récurrente rémittente (SEP-RR) définie par des paramètres cliniques ou IRM.
En France, compte tenu des effets indésirables graves survenus au cours du développement du produit avec un effet rémanent important et des risques potentiels de son administration à moyen terme, la commission de la transparence de la HAS a restreint l’inscription de Lemtrada® aux patients ayant une forme sévère de SEP-RR, définie par la survenue de 2 poussées invalidantes ou plus au cours d’une année, associée(s) à une activité inflammatoire à l’IRM cérébrale (1 ou plusieurs lésion(s) rehaussée(s) après injection de Gadolinium), malgré un traitement de 1ère ou de 2ème ligne.
Une procédure d’arbitrage de réévaluation du rapport bénéfice/risque selon l’article 20 a été initiée à l’issue des discussions du Comité pour l’Evaluation des Risques en matière de Pharmacovigilance (PRAC) du mois d’avril 2019. Cette décision fait suite à l’observation de nouveaux cas (y compris mortels) d’atteintes liées à des réactions immunitaires et cardiovasculaires.
Le PRAC a donc recommandé, comme mesure transitoire, que le traitement ne puisse plus être initié chez d’autres patients que ceux atteints des formes très actives de SEP-RR ayant été déjà traités par au moins deux traitements immunomodulateurs prescrits dans la SEP ou lorsqu’aucun autre traitement immunomodulateur ne peut être utilisé. Les patients traités par Lemtrada® peuvent être amenés à poursuivre leur traitement après consultation de leur médecin (s’il en considère la nécessité).
Une lettre à l’attention des professionnels de santé (DHPC) a été adoptée par le PRAC afin de communiquer sur les nouveaux risques, la restriction d’indication pour les nouveaux patients et la réévaluation de la balance bénéfice/risque initiée.
Outre cette restriction, le PRAC a recommandé une mise à jour de l’information produit (Résumé des Caractéristiques du Produit « RCP » et notice) afin d'informer les patients et les professionnels de santé concernant les cas:
-
d’atteintes auto-immunes susceptibles d’apparaitre, notamment l'hépatite auto-immune et la lymphohistiocytose hémophagocytaire;
-
d’atteintes cardiovasculaires survenant dans les 1 à 3 jours suivant l'administration du médicament, notamment des cas d’hémorragie alvéolaire pulmonaire, infarctus du myocarde, accidents vasculaires cérébraux, dissections artérielles cervico-céphaliques;
-
de neutropénie
Les professionnels de santé doivent envisager d'arrêter le traitement chez les patients présentant des symptômes en lien avec ces affections.
Les patients doivent consulter immédiatement un médecin s'ils présentent ces symptômes.
L’EMA évaluera toutes les données disponibles en matière de sécurité du médicament et examinera toutes les possibilités de mettre en place des mesures supplémentaires nécessaires pour protéger les patients et déterminera s’il convient de modifier l’indication dans laquelle le médicament est autorisé.
Démarrage d’une procédure de réévaluation européenne concernant les crèmes contenant de l'estradiol à dosage élevé – arbitrage (article 31)
L’EMA a débuté une nouvelle réévaluation des produits (crème) contenant de l'estradiol à dosage élevé (0,01 % en poids). Ces produits, qui ne sont pas autorisés en France actuellement, sont utilisés dans d’autres pays européens dans le traitement de l'atrophie vaginale chez les femmes post-ménopausées.Cette nouvelle réévaluation fait suite à l’annulation partielle par la Cour de justice de l’Union européenne en mars 2019, pour des raisons de procédure, des conclusions de la précédente réévaluation. En effet, en 2014, l’EMA avait recommandé suite à une procédure d’arbitrage (article 31) des mesures de réduction des risques, y compris une limitation de la durée maximale d’utilisation à 4 semaines.
Suite à cette annulation, un nouvel arbitrage a été déclenché par la Commission européenne selon l’article 31 de la Directive 2001/83/CE.
Modafinil - Résultat d’évaluation des données de sécurité liées à l’utilisation du modafinil en cas de grossesse
Les médicaments à base de modafinil (Modiodal et génériques) sont indiqués chez l’adulte dans le traitement de la somnolence diurne excessive lorsqu’elle est associée à une narcolepsie avec ou sans cataplexie (perte du tonus musculaire).Une revue des données de sécurité portant sur l’exposition au modafinil pendant la grossesse a été initiée en février 2019 par le PRAC. Cette analyse a été initiée à la suite de la réception des résultats d’une étude observationnelle réalisée aux États-Unis.
Dans ce contexte, au mois de février 2019, dans l’attente des conclusions du PRAC, l’ANSM a rappelé les modalités de bon usage du modafinil en cas de grossesse.
A la suite de l’évaluation du risque potentiel pour le fœtus en cas d’exposition au modafinil pendant la grossesse, le PRAC a conclu en avril 2019 que le modafinil est suspecté d’être à l’origine de malformations congénitales et qu’il ne doit pas être utilisé
- au cours de la grossesse,
- ni chez les femmes en âge de procréer n'utilisant pas de contraception efficace.
Pour rappel, l'efficacité de la contraception orale pouvant être diminuée par le modafinil, des méthodes contraceptives alternatives ou associées sont recommandées chez les patientes traitées et une contraception alternative ou complémentaire de la pilule doit être poursuivie pendant 2 mois après l’arrêt d’un traitement par modafinil.
Les médicaments à base de modafinil sont soumis à prescription initiale annuelle réservée aux spécialistes en neurologie, aux services spécialisés en neurologie et aux centres du sommeil.